Surbooké

Le blog de Laurent Bisault

Les indésirables, Diane Ducret, Éditions Flammarion

Avr 5, 2018 #Flammarion

La rafle du Vel d’hiv, vous connaissez nécessairement. La honte de l’État français qui envoya les 16 et 17 juillet 1942 ses policiers et gendarmes arrêter 13 000 Juifs pour les parquer au Vélodrome d’hiver. Avant de les coller dans des wagons à bestiaux direction Auschwitz. Mais celle de 15 mai 1940, qui en a entendu parler ? D’où l’intérêt du passionnant livre de Diane Ducret qui, mêlant histoire et fiction, nous la raconte. Cette rafle ramassa plusieurs milliers de femmes apatrides qui étaient alors perçues comme des ennemies potentielles pour la France en guerre contre l’Allemagne. Elles venaient pour la plupart d’Europe de l’Est ou d’Allemagne et n’étaient pas toutes Juives. Diane Ducret axe son roman sur deux personnages : Eva Platz une Allemande qui a fui sa famille plus que son pays et Lise Malher qui s’est réfugiée en France avec sa mère juive. Elles côtoient des personnalités qui ont véritablement transité par le Vél d’hiv avant d’être envoyées dans le camp de Gurs près d’Oloron-Sainte-Marie (Pyrénées-Atlantiques). On aperçoit au détour des pages la philosophe Hanna Arendt et, moins connue, l’actrice Dita Parlo. Le passage au Vélodrome d’hiver n’a pas grand-chose à envier à celui de 1942, le lieu se transformant rapidement en ignoble cloaque. Mais au moins n’était-il pas peuplé d’enfants en 1940. Le départ se fait en train vers une destination inconnue. Les femmes passent par Lyon avant d’aboutir dans le camp où l’armée française parquait déjà plusieurs milliers de Républicains espagnols. On contrôle l’identité des indésirables à l’entrée du camp. « Bébé » demande une gardienne à Dita Parlo. « Pas encore mais ça peut s’arranger si vous me laissez deux minutes avec les Espagnols ». Eva et Lise sont installées dans des baraquements et manquent de tout. L’hygiène est dramatique et sera vecteur d’épidémies mortelles. Les femmes doivent aussi accepter d’oublier toute pudeur et faire avec le viol des gardes-chiourme. Pourtant, la solidarité s’installe. D’abord entre les femmes qui apprennent à s’entraider puis avec les Espagnols, même si les contacts entre femmes et hommes sont interdits. L’amour fait son apparition, surtout pour Lise qui n’a jamais connu d’amant. Eva pense toujours à Louis qui est parti faire la guerre avant son arrestation. Avec l’aide du commandant du camp, les femmes de leur baraquement réussissent à monter un spectacle de cabaret. C’est un moyen pour elles d’exister et accessoirement de récolter quelques fonds auprès des civils locaux qui assistent au spectacle. Et une grande satisfaction pour ces femmes qui avaient été si mal accueillies à Gurs par les habitants. Avec l’Armistice, les Allemandes sont libérées au bout d’un mois. Elles sont remplacées par les Juifs des régions de Bade et du Palatinat. Leur arrivée détériore encore un peu plus les conditions de vie au camp. Et il faut faire avec l’hiver de 1940 qui est exceptionnellement froid. Le temps d’un nouveau transfert vers la Pologne n’est pas loin.

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