Surbooké

Le blog de Laurent Bisault

Le dernier des nôtres, Adélaïde de Clermont-Tonnerre, Éditions Grasset

Déc 2, 2017 #Grasset

Pas si facile de raconter une histoire qui happe le lecteur au point qu’il ne souhaite plus lâcher son bouquin. Adélaïde de Clermont-Tonnerre vous en offre deux pour le même prix. La première débute à Manhattan en 1969 quand Werner Zilch aperçoit la cheville d’une exquise jeune femme dans un restaurant. Le reste est à l’avenant. Les cuisses, les bras, la chevelure blonde à en illuminer une pièce plongée dans l’obscurité et des nichons à faire bramer un cerf. Encore que personne ne soit totalement certain de l’attrait des nichons sur les cerfs. Faut-il préciser que, même accompagné de son ami et fidèle associé Marcus et de son chien Shakespeare gros comme un ours, Werner est obsédé par la gent féminine. Mais il n’y est pour rien. Ce garçon est grand, beau et les tombe toutes sans même se fatiguer. S’est-il battu au lycée avec un élève plus âgé qui imposait sa loi, qu’il reçoit derechef la langue de la plus jolie lycéenne dans la bouche. Sans penser à dénoncer son agresseuse sur Tweeter. Sourit-il à une hôtesse de l’air qu’elle revient avec deux parts de dessert. Aussi décide-t-il de faire valoir ses atouts pour conquérir la sublime blonde. Faute de pouvoir lui demander ses coordonnées, il la suit, repère où elle gare sa voiture avant d’emplafonner le véhicule et de laisser un mot pour le constat. Cela lui vaut de retrouver sa voiture dans le même état avec les coordonnées de celle qu’il recherchait. Autant dire que c’est gagné. Pour séduire Rebecca, il l’invite à dîner au dernier étage de la tour qu’il construit à Manhattan. Car Werner, comme Marcus, est un modeste promoteur immobilier. Ultime atout, il fait monter par ses ouvriers un piano pour créer une atmosphère romantique. Comme quoi on aurait tort de sous-estimer l’intérêt de notre environnement professionnel. Encore que le succès semble plus improbable si vous décoriez votre appartement d’indices ou de séries temporelles. Normalement on devrait fuir de tels personnages tant leur psychologie est simpliste. Erreur. On s’accroche, on déborde d’empathie, on plaint Marcus quand il se fait jeter par le père de Rebecca qui considère qu’un millionnaire en puissance n’est pas digne de la fille d’un milliardaire. Il faudrait quand même lui dire qu’il pourrait adhérer à Sud Promotion immobilière pour se protéger de l’arrogance des nantis. La deuxième histoire débute à Dresde en 1945. Les Anglais viennent de bombarder la ville au phosphore. Les civils meurent brûlés jusque dans les caves. 100 000 morts totalement inutiles car la guerre prend fin. Une jeune femme qui a perdu ses jambes se fait faire une césarienne à l’opinel pour sauver son bébé. On se permet de vous le dire, c’est le futur Werner. Il côtoie Wernher von Braun, l’inventeur des missiles V2 qui martyrisèrent les Londoniens. Ça tombe bien ils ont presque le même prénom. L’histoire fera un crochet à Auschwitz, c’est dans le coin et ça réduit les frais de déplacement, avant de rebondir aux États-Unis. On vous laisse découvrir la fin avant de vous jeter sur un autre roman de Mme de Clermont-Tonnerre puisque ça se dévore. Sacrée Adélaïde !

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