Florence et Martial se sont baladés pendant quinze ans dans toute la France au gré des chantiers qu’il trouvait. Martial était tailleur de pierre, il bossait à la réfection de monuments classés et de sites historiques. Florence se contentait de petits boulots et s’occupait des chiens. Elle avait grandi dans une vieille ferme du Haut-Jura qu’elle avait quittée d’autant plus tôt que ses parents n’avaient pas tenté de la retenir. Quand Florence et Martial se sont séparés parce qu’ils allaient finir par se tuer, elle est retournée chez ses parents, elle avait besoin de la chaleur du foyer familial. Après cinq mois passés à se faire câliner la jeune femme est partie à Saint-Claude pour un boulot de caissière et un petit appartement. Sept années après l’avoir croisée devant sa caisse, Aymeric la retrouve à un concert. Florence a quarante ans, elle est infirmière, elle est enceinte, elle vit seule, il n’y a pas de père. Du moins officiellement, car Florence le connaît, il s’appelle Christophe, c’est un collègue qui est au courant de sa grossesse mais qui ne veut pas remettre en cause ce qu’il a construit avec sa femme et leurs deux enfants. Aymeric a vingt-cinq ans, il est sorti depuis peu de prison. Il était devenu chiant quand sa première petite amie l’avait quitté. Il avait accepté de tremper dans les combines d’un copain, ils se sont fait prendre, leur délit n’était pas monstrueux, mais la règle était à l’époque d’exécuter sa peine. Florence et Aymeric se mettent ensemble, puis elle accouche d’un petit Jim. Aymeric s’y attache et quelques années après Christophe revient.

C’est fou comme il te ressemble mon fils

Tout est beau dans ce bouquin, beau à pleurer. Je n’avais jamais entendu parler de Pierric Bailly, ni même lu aucun livre édité chez P.O.L. J’ai découvert Le Roman de Jim sur le compte Instagram de Grégory Nicolas qui pour le présenter s’est contenté d’un sobre « Sans doute un des plus beau livres que j’ai lus. Bravo ». Je ne saurais mieux dire. Le Roman de Jim c’est l’histoire d’une paternité contrariée. Celle d’Aymeric qui n’a jamais envisagé d’avoir un enfant, et qui se retrouve père par défaut. Florence ne le lui demande pas, mais il est là et il s’y colle sans réfléchir. Ça se passe plutôt bien, d’autant mieux Florence est amenée à retourner vivre avec sa mère sur les plateaux jurassiens. La nature, la faune, la flore, la découverte des paysages, de tout ce qu’on peut y faire, sont autant de moments qu’Aymeric partage avec Jim. Il l’emmène à l’école, le trimbale partout au point qu’on finit par lui dire « C’est fou comme il te ressemble ton fils ». Le roman est en partie autobiographique. Par ses lieux puisque Pierric Bailly est Jurassien, par les déplacements des personnages, le romancier étant comme beaucoup parti à la ville avant de revenir sur ses terres natales. Par la déchirure que vit Jim qui ressemble à celle du jeune Pierric après le divorce de ses parents. Alors lisez le pour découvrir la vie d’un jeune précaire qui choisit d’aller d’un contrat en usine à un autre dans une chaîne de boulangerie parce que c’est ainsi qu’il se sent libre. Pour découvrir la beauté de la nature jurassienne qui va bien au-delà des pistes de ski de fond. Pour savourer la solidarité d’un territoire où on s’entraide pour retaper une masure. Mais surtout pour vivre au milieu de cette famille qui se crée, se recompose, se déchire entre mensonges et coups bas. Lisez ce roman d’initiation et d’amour, magnifiquement écrit, vous ne serez pas déçus.

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