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Le blog de Laurent Bisault

Le jour où ma mère m’a tout raconté, Philippa Motte, Éditions Stock

Mar 15, 2023 #Stock

Hector Paoli et sa femme Philippa dite Lili ont rendez-vous dans le service psychiatrique de l’hôpital de Montfavet près d’Avignon. Selon Hector Lili hurlerait et aurait la veille tenté d’étrangler Sophie la plus de jeune de leurs trois enfants. Lili a honte de ce qui s’est passé, mais elle sait qu’elle n’aurait jamais véritablement serré le cou de sa benjamine. Elle tient trop à elle ainsi qu’aux deux aînés Catherine et Pierre. Sur l’insistance du médecin Lili accepte l’hospitalisation qui pourrait ne pas excéder quinze jours. Elle a trente-huit ans, elle est née en 1931 en Corse là où on dit « mieux vaut un garçon qui mourra qu’une fille qui vivra ». Même à vingt ans Lili ne sortait guère du logement familial d’Ajaccio. En tout cas jamais seule, sur l’île cela ne se faisait pas. Un jour elle rencontra Jérôme un bel homme de trente-cinq ans en voyage d’affaires. Ils se fréquentèrent au café, puis dans les rues d’Ajaccio, enfin dans la chambre du séducteur. Rapidement le père, le frère et la mère de Lili hurlèrent au déshonneur, ils la traitèrent de putain, ils affirmèrent qu’elle souillait l’honneur familial. Quand le bel homme repartit sur le continent retrouver sa femme et son fils, elle le suivit mais son père envoya deux amis la récupérer. Et sa mère se chargea de faire passer l’enfant.

Il est difficile de s’épanouir dans cette société clanique

Petit livre par sa pagination, immense bouquin par les émotions qu’il suscite. C’est une histoire toute personnelle que nous raconte Philippa Motte dans son premier roman. L’histoire d’une femme de sa lignée, peut-être sa grand-mère, une femme dont elle porte le prénom. Et qui était originaire du même petit village perché dans les montagnes corses que l’autrice. C’est peu dire qu’il est difficile de s’épanouir dans cette société clanique où l’omerta s’est immiscée dans les rapports humains. Où chaque génération porte le poids de la précédente. Alors la famille de Lili a fait le nécessaire pour retrouver sa dignité au risque de plonger la jeune femme dans la folie. Ces failles mentales Philippa Motte les connaît bien. Elle les a vécues en étant internée deux fois trois mois en hôpital psychiatrique. Elle en a fait son métier en donnant aujourd’hui des formations en entreprise pour favoriser l’insertion de ceux qui ont connu des difficultés psychiques. C’est sûrement pour cela qu’elle nous décrit avec tant d’humanité la vie de ceux qui flirtent avec la folie. Qu’elle a inventé ou fait revivre Antonin, le mage qui à Montfavet décryptait l’avenir avec les cartes d’un jeu de Mille Bornes. Alors certes les rapports de Lili et de ses enfants sont douloureux. Certes elle ne parviendra jamais à effacer les taches qu’on lui a fait porter. Mais ce n’est pas une raison pour se priver d’un tel bouquin.

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