Lire pour la troisième fois un roman de mille pages n’a rien d’anodin. Le bâtard de Palerme occupe donc dans ma bibliothèque virtuelle une place à part. Ce n’est certes pas pour moi le plus grand des livres, mais c’est celui qui revisité à intervalles suffisamment longs me garantit un immense plaisir. Celui que j’avais ressenti à l’adolescence en découvrant la trilogie d’Alexandre Dumas constituée des Trois mousquetaires, de Vingt ans après et du Vicomte de Bragelonne. Souvent considéré comme le Dumas Sicilien, Luigi Natoli jouit dans son pays d’une immense notoriété. En France il est quasi inconnu et il faut remercier les Éditions Métailié de ressortir en collection de poche son Histoire des Beati Paoli en trois volumes. Le bâtard de Palerme pour commencer, La mort à Messine ensuite, et Coriolano pour terminer. Comme Dumas, Natoli nous livre un récit de cape et d’épée avec pour héros le jeune Blasco de Castiglione qui passe son temps à défier tous ceux qui ne respectent pas l’honneur des belles dames. Mais contrairement à l’auteur français le Sicilien reste fidèle à l’histoire de son pays. Les Beati Paoli ont véritablement existé, et cette société secrète apparue à Palerme au XII° siècle est souvent présentée comme la forme primitive de la mafia sicilienne. Elle tire son origine d’une société éternellement dominée par les envahisseurs, grecs, normands, espagnols, savoyards, qui ont passé leur temps à se gaver des richesses de l’île. Au XVIIIe siècle les Beati Paoli sont encore dépeints comme des justiciers et sont encore loin des meurtriers qui leur succéderont. Ils ne sont pas pour autant ceux qui remettent en cause l’organisation de la société, il faudra pour cela attendre Le Guépard de Giuseppe Tomasi di Lampedusa. Mais peu importe il y a assez à déguster comme cela. Alors place au panache de Blasco et aux infamies du sbire Matteo Lo Vecchio le chef des argousins. Place à la belle Donna Gabriella duchesse de la Motta prête à tout pour conquérir et conserver l’amour de Blasco. Place aux duels à l’épée, et peu importe si le roman pourrait être plus court, il ne faut pas bouder son plaisir.
Blasco de Castiglione n’a pas un sou, un cheval de paysans, de la fierté à revendre, et une revanche à prendre sur la vie
Janvier 1698, Palerme. Le chevalier don Raimondo Albamonte apprend la mort de son frère le duc de la Motta. Il se voit aussitôt hériter de son titre et de sa fortune, mais sa belle-sœur met au monde un garçon qui l’en prive. Don Emanuele Albamonte, duc de la Motta, avait consacré sa vie à affronter les dangers. En plongeant sa dague dans la gorge des loups qui pullulaient dans ses vastes domaines. Et en guerroyant à Messine puis en Espagne quand il n’eut plus personne à tuer en Sicile. C’est en soldat que le duc trouva la mort sur une galère algérienne qui l’avait capturé lors de son retour au pays. Courageux comme il l’avait toujours été, Emanuele avait brisé ses fers pour tenter de libérer ses compagnons, ce qui lui valut d’être abattu d’un coup de feu. Le vice-roi de Sicile confie alors la tutelle du jeune duc jusqu’à sa majorité à Don Raimondo Albamonte qui n’a plus qu’une idée en tête : se débarrasser du nourrisson et de sa mère. Le jeune duc est pourtant sauvé par des serviteurs restés fidèles à la mémoire de son père puis recueilli par d’honnêtes Siciliens. En septembre 1713 un jeune cavalier pénètre dans Palerme. Blasco de Castiglione n’a pas un sou, un cheval de paysans, de la fierté à revendre, et une revanche à prendre sur la vie. Il a pour tout bagage une lettre qu’un ecclésiastique lui a donnée quand il avait dix ans. Blasco en a désormais vingt-cinq et le destinataire de la missive lui apprend que ses parents sont tous deux morts. Il va consacrer toute son énergie à découvrir qui il est.
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