Août 2022, Lila a quarante et un ans, pas de bébé, alors qu’elle en a toujours voulu un. Peut-être aurait-elle dû être plus accommodante avec ses petits amis. À son âge il y a des choses qui deviennent difficiles à accomplir, et pas uniquement la digestion du mélange vodka – gin tonic. Sa mère Parissa est née en 1950 à Téhéran dans une famille aristocratique. Après avoir épousé Alexandre Pradel un Français qui faisait ses études en Iran, elle quitta son pays en 1981. L’ayatollah Khomeini avait pris le pouvoir deux années avant. À peine arrivé en France, Alexandre mourut dans un accident de la route. C’est à peu près tout ce que Lila sait de ses origines parce que son père était orphelin et que sa mère a coupé tous ses liens avec son pays de naissance. Pourtant le jour où elle s’attable dans un restaurant iranien de Paris, les saveurs inconnues issues du riz, des amandes, des griottes, du safran et du poulet lui parlent. C’est comme si ce repas la rattachait à ses racines . Sans l’avoir délibérément voulu Lila se découvre enceinte. Pas de Simon son ancien fiancé qui ne voulait pas d’enfant, et qu’elle ne voit plus depuis un an. De qui alors ? Lila scrute ses dernières relations, croit identifier le père, mais n’en est pas sûre. Une certitude quand même : elle veut garder le bébé. Quand elle reçoit les résultats de son test ADN, grosse surprise : ses gènes viennent à 98 % d’Iran. Sa mère lui a donc menti sur son géniteur. Alors Lila s’envole pour Téhéran à la recherche de son histoire, avec pour premier point de chute Reza son grand-père maternel.
Elle découvre comment la jeunesse de Téhéran contourne les interdits du régime
Il y a assurément dans ce roman beaucoup de l’histoire familiale de Shirin Rashidian, qui est née en Iran en 1981 avant de migrer avec ses parents en France. Il y a aussi beaucoup d’amour pour ce grand pays à la civilisation millénaire, dont la population a subi successivement depuis près d’un siècle les dictatures de Mohammad Reza Shah Pahlavi puis de la République islamique. Et comme si ça ne suffisait pas, la guerre avec l’Irak déclenchée par Saddam Hussein, n’est pas oubliée avec ses 300 000 morts côté iranien. Les petites révolutions d’une Française à Téhéran n’ont pourtant rien d’un pamphlet politique. Il s’agit avant tout de l’histoire d’une Française qui part en Iran à la recherche de ses racines. C’est ainsi que Lila découvre comment la jeunesse de Téhéran détourne les interdits du régime qui lui pourrit la vie. Et ce n’est pas sans risque tant la police des mœurs a le fouet facile et l’habitude d’emprisonner celles et ceux qui lui résistent.
Le réseau de surveillance de la population est omniprésent
Parmi les multiples ruses locales pour s’en abstraire, il y a cette application, une sorte de Waze des keufs, qui avertit de l’arrivée des policiers. Ou encore l’utilisation de bouteilles d’eau ou de jus de fruit pour transporter de l’alcool. Les taxis sont également prisés pour que hommes et femmes puissent se côtoyer. Reste également la possibilité d’avoir recours à un mariage de quelques heures pour avoir des relations sexuelles légales. Les libéraux anglo-saxons qui prêchent pour un monde flexible croyaient avoir tout inventé. Que nenni, les islamistes les ont en Iran battus à plate couture ! Mais pour les gays pas d’autre solution que de se déguiser en femme avec un tchador. Les confrontations de la jeunesse iranienne avec les représentants des mollahs sont toutefois profondément inégales, tant le réseau de surveillance de la population est omniprésent. Il n’a rien à envier à celui qui fut celui de la Stasi en RDA. Pour le bonheur du lecteur, Lila a un grand-père ancien officier de l’armée royale, rescapé des prisons islamiques, qui a repris pied en ouvrant un restaurant. Cela nous permet de découvrir une cuisine étincelante, qui paraît parfaitement accessible. On se reportera à la fin du bouquin pour retrouver ces recettes qui font toutes envie.
Vous pourriez aussi apprécier
Abonnez-vous pour être averti des nouvelles chroniques !
Bonjour Laurent et merci pour votre message qui me touche vraiment. Comment avez vous entendu parler du livre ? N’hésitez pas à faire un post et à en parler à vos amis. J’espère que les recettes vous plairont 🙂 vous pouvez me suivre sur Instagram shirin_rashidian_auteure