Surbooké

Le blog de Laurent Bisault

Le carnaval des ombres, R.J. Ellory, Éditions Sonatine

Juin 28, 2021 #Sonatine

Difficile de parler d’un livre qui ne vous a pas vraiment convaincu. Surtout quand on vénère son auteur. Alors comme le roman est présenté par certains pour une des plus belles réussites de R. J. Ellory, n’hésitez pas à vous forger votre opinion. Ce qui est certain c’est que Ellory est un immense écrivain dont on trouve sur ce blog la présentation de six romans. Il y en aurait même davantage si Surbooké avait été créé plus tôt, car cela fait bien longtemps que le romancier nous régale. Le carnaval des ombres est un roman policier classique, qui se déroule comme souvent chez Ellory dans l’Amérique profonde, bien que le romancier soit anglais natif de Birmingham. Le carnaval des ombres est un gros bouquin, pas loin de six cent pages, qui commence très fort. Disons que le premier tiers emporte tout. C’est noir, très noir, et totalement emballant. C’est ensuite que la tension retombe, et là il ne se passe plus grand-chose, avant de repartir vers la fin avec un dénouement que l’on pourrait qualifier de convenu. Les personnages, à commencer par le principal Michael Travis, sont attachants et complexes. Le plus gros du récit est consacré à l’enquête que cet agent du FBI mène sur un meurtre commis à Seneca Falks pas très loin de Kansas City. Le roman vaut aussi pour la description de l’époque, la fin des années cinquante, la période du maccarthysme. Il propose également une réflexion sur le rôle du FBI, une institution qui s’était attribué beaucoup de pouvoirs. Un peu comme Ellory l’avait fait sur la CIA dans Les anonymes.

Cela dura jusqu’aux quinze ans de Michael quand sa mère planta un couteau dans l’œil de son père

Nous sommes en 1958 et l’agent spécial du FBI Michael Travis âgé de 31 ans est chargé de sa première enquête. Il est envoyé aider le shérif Charles Rourke sans que le FBI soit sûr que le crime relève de la police fédérale. Il débarque à Seneca Falks une petite ville tranquille du Midwest où des forains, des bohémiens pour Rourke, se sont installés sans être les bienvenus. Le spectacle reçoit pourtant un gros succès car il offre tout ce qu’il faut pour séduire les spectateurs : un squelette humain, la femme aux gros pieds, un rat géant, la voiture de Bonnie and Clyde, l’homme qui a trop de doigts et bien d’autres attractions. C’est à la fin de la représentation que l’on découvre le corps d’un homme sous un manège. Michael Travis est un homme complexe, né dans le Nebraska de deux adultes qui n’auraient jamais dû se marier ensemble. Mais comme sa mère Janette Alice Cook était enceinte, elle n’eut guère le choix. Janette épousa Jimmy Travis, un connard obstiné, intelligent et misogyne. Son propre père l’avait décrit pendant son adolescence comme 50 kilos de viande hachée avec le charme et le bon sens d’un poteau de clôture. Le jour de son mariage Jimmy Travis but tellement qu’il ne put accomplir son devoir conjugal. Janette se dit que ça s’arrangerait avec la paternité mais ce fut pire, même s’il ne commença à la battre qu’après son accouchement. Cela dura jusqu’aux quinze ans de Michael quand sa mère planta un couteau dans l’œil de son père. Alors Janette savoura les quelques heures de liberté dont elle bénéficiait. Michael fut placé au centre de protection de l’enfance. Sans doute se demanda-t-il de quoi l’établissement le protégeait. Assurément pas des cruautés du directeur, ni du règlement qui prévoyait de l’envoyer au trou pour pas grand-chose, et pas davantage des autres enfants. Michael dut cohabiter avec le caïd de la place, Anthony Scarapetto qui avait à neuf ans tué un homme. De cette période, Travis gardera beaucoup de traces qu’il aura bien du mal à cacher.

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