Bienvenue dans le monde de Mario Conde à Cuba. Celui d’un ancien policier, survivant tant bien que mal dans cette île où plus rien ne fonctionne, au point qu’une partie de ses habitants ont fini par se mettre à l’eau sur un radeau direction Miami. Acceptant ainsi le risque de se noyer ou de se faire bouffer par un requin, voire les deux à la fois. Ce qui constitue probablement la version cubaine de l’économie circulaire. Car rien ne se perd dans cet État. Ni les privilèges des tenants du dogme officiel de l’égalité. Ni la pauvreté des habitants. Conde n’échappe pas à la règle au sein de sa tribu constituée de Tamara qu’il ne se décide toujours pas à épouser de peur de rompre la complicité qui les lie depuis tant d’années. De ses amis, de son chien Basura II, des indispensables bouteilles de rhum, des plats de riz aux haricots noirs. Et de la musique de Creedence Clearwater Revival et de Blood, Sweat and Tears. Soit assez pour se protéger de la moiteur cubaine tout en profitant au mieux de la vie. Mario Conde est cette fois amené à rechercher un tableau de Rembrand qui serait arrivé à Cuba dans les valises de la famille Kaminsky en 1939. Quand elle tentait d’échapper au destin promis aux Juifs en traversant l’océan sur un bateau qui avait miraculeusement réussi à quitter l’Allemagne. Mais pas plus qu’aujourd’hui il n’était à cette époque facile pour des réfugiés d’être accueillis dans un nouveau pays. Ce qui leur valut de repartir au point de départ avant de migrer définitivement vers la Solution finale. Ultime espoir de survie, le tableau qui devait leur permettre de payer leur liberté avait au passage était préempté. Daniel Kaminsky, qui avait précédé ses parents sur l’île ne s’en remit pas et renia son judaïsme devenant de fait un hérétique. C’est son fils Elias qui verra de son domicile américain réapparaître le tableau dans une vente aux enchères londonienne. D’où son recours aux bons services de Conde pour comprendre d’où il venait et plus encore la vie de son père. Cela nous fera voyager dans le temps et dans l’espoir comme souvent chez Padura. Jusqu’à la ville d’Amsterdam en 1643 quand Rembrandt lui aussi se débattait contre la misère. Et quand Elias Ambrosius Montalbajo de Avila, lointain ancêtre des Kaminsky, tentait d’apprendre à peindre en bravant l’interdit des rabbins. Hérétique un jour, hérétique toujours.