Surbooké

Le blog de Laurent Bisault

La chorale des dames de Chilbury, Jennifer Ryan, Éditions Albin Michel

Fév 3, 2020 #Gallimard

Du sang, de la sueur et des sourires, n’en déplaise à Sir Winston. Nous sommes en 1940 à Chilbury, petit village du Kent. La guerre a commencé, privant la communauté de ses hommes partis se battre sur terre, dans les airs et sur mer. Voire dans les mers puisque Edmund, le premier mort de Chilbury vient d’être coulé par une torpille dans son sous-marin. Question quasi insoluble, comment lui rendre hommage quand le cœur du village est privé de ses indispensables voix mâles ? C’est ainsi que commence ce sémillant portrait des habitants, et plus encore des habitantes du village. Car ici comme ailleurs les femmes vont se prendre en main, et remplacer avantageusement les hommes, y compris au sein de la chorale. Sans oublier de rester dignes en toute circonstance, nous sommes quand même en Angleterre. N’allez pas pour autant croire que tous les personnages du roman soient fréquentables, fussent-ils de la Haute. Chez les Winthrop, le général qui vient de perdre son fils, s’apprête à prendre quelques libertés avec la morale. Il a de bonnes raisons de le faire, puisque dans cette famille la transmission du patrimoine se fait par les mâles. À défaut, elle s’en trouverait dessaisie. Edmund n’étant plus, il urge pour son père de lui trouver un successeur. Madame étant enceinte jusqu’aux dents, tout espoir n’est pas perdu. Mais comme il vaut mieux prévenir que guérir, le général Winthrop s’en va trouver Edwina Paltry sage-femme au village pour lui proposer un marché. À charge pour elle de lui garantir le sexe de son rejeton, au besoin en procédant à un échange de bébés, et il lui en sera financièrement reconnaissant. L’accord est rapidement conclu, même si son coût s’avère plus élevé que ce qu’avait provisionné le général. Celui qui se voit comme le principal personnage du village n’en est pas pour autant au bout de ses peines. Car même si ses filles, la petite Kitty et la belle Venetia, ne comptent pas pour lui, cela ne les empêche pas de vivre. Passe encore que Kitty soit amoureuse du sieur Henry Brampton Hall, fraîchement engagé dans la Royal Air Force. Cela se traduit surtout par des pages d’écriture dans son journal, où elle se répand contre son infecte sœur qui a séduit Henry. Non que Venetia en soit elle-même amoureuse. Ou qu’elle souhaite nuire à Kitty. Il s’agit juste pour l’aînée de séduire encore et encore tout ce qui porte un pantalon digne d’intérêt dans le village. Et elle n’a pas froid aux yeux la mâtine. En temps normal tout se passerait comme prévu. Mais nous ne sommes pas en temps normal. Nous sommes en temps de guerre, avec les avions nazis qui se pointent à l’horizon. De nouveaux personnages qui apparaissent. Des sentiments parfaitement imprévisibles qui font tout déraper. Alors on s’adapte. Les caractères se révèlent. Mais tout en respectant les apparences. Que diriez-vous d’une tasse de thé avant d’aller déblayer les décombres du dernier bombardement ?

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