Envie d’un épatant roman auvergnat ? Alors allez-voir du côté du Château des Bois-Noirs. Auvergnat, le roman l’est parce qu’il se déroule en un seul lieu : Saint-Rémy-sur-Durolle (Puy-de-Dôme) dans le massif montagneux des Bois-Noirs. Ici pas de coups de couteau malgré la proximité de Thiers mais une atmosphère sombre issue d’une nature rude et d’une histoire qui n’a pas été avare en meurtres. Non que les assassins fleurissent particulièrement dans le village mais parce qu’il a bien fallu se défendre au cours des siècles. Contre les assaillants au Moyen Âge, contre les Chauffeurs au XVIIIe siècle, puis contre les Allemands pendant la seconde guerre mondiale. Épatant, le livre l’est par ses personnages que l’on découvre au début des années 1950. Hélène, parisienne d’une trentaine d’années épouse Gustave, propriétaire d’un château en décrépitude en Haute Auvergne. Le plus surprenant est que le hobereau ait réussi à séduire la jeune femme élevée du côté du XVIe arrondissement tant il manque de charme. Mais Hélène est orpheline et la famille qui l’a recueillie est bien contente de la placer. Fini le snobisme en vogue dans les cercles parisiens. Bonjour la rudesse d’une nature peu accueillante. Par chance Mme Dupin, la mère de Gustave, reçoit avec amour sa bru qui le lui rend bien. Elle en aura bien besoin, même si son mari a fait quelques efforts en l’emmenant en voyage de noces en Italie et en faisant refaire sa chambre. C’est d’ailleurs la seule pièce présentable dans le château. Les serviteurs sont à la hauteur du décor : Antoine le factotum et frère de lait de Gustave, l’effraie et la servante, boiteuse, a tout de la sorcière. Si le début de leur vie conjugale se déroule bien, cela ne dure pas. Gustave souffre d’un égotisme prononcé et ne parle presque pas. Son principal intérêt, il le voue à sa collection de timbres, qui par les ventes qu’il effectue est aussi une importante source de revenus. L’attention qu’il porte à Hélène se résume à peu de chose : regarder sa femme se déshabiller et la saillir si possible. La séquence de strip-tease lassant rapidement Hélène, leurs rapports se dégradent rapidement. Surtout que le jeune frère de Gustave a beaucoup plus à offrir. Charmeur, brillant avec les femmes au contraire de Gustave qui n’a connu que de rares soubrettes, Fabien aurait aussi géré bien mieux le domaine que son frère. À commencer par ce qui fut autrefois une papeterie et qui n’est plus qu’une ruine où un employé arthritique transforme avec peine de vieux chiffons. Victime du droit d’aînesse qui l’a poussé à vivre on ne sait trop comment à Clermont-Ferrand, Fabien va peu à peu réveiller la jalousie de son frère et susciter l’amour d’Hélène. Mais que croyez-vous ? Que l’on peut aisément développer une liaison dans un village où on n’a rien d’autre à faire que surveiller son prochain ? Ce serait trop simple. Surtout quand vos serviteurs sont là pour vous rapporter tout ce qui se déroule dans les dépendances.