Surbooké

Le blog de Laurent Bisault

Tout ce dont on rêvait, François Roux, Éditions Albin Michel

Sep 4, 2018 #Albin Michel

On craint parfois de lire le nouveau bouquin d’un auteur qu’on a adoré. Peur qu’il n’ait plus rien à dire. Peur que cela ne soit pas aussi bien. Peur d’effacer de si bons souvenirs. Nombreux sont ceux qui ont découvert le talent de François Roux en lisant Le bonheur national brut. Ce roman était si réussi qu’il est à l’origine de la création de cette lettre, car il aurait été dommage de ne pas le partager. Tout ce dont on rêvait n’a pas bénéficié d’autant de soutiens médiatiques même s’il a figuré parmi les finalistes du prix RTL – Lire 2017. Mais peu importe. Tout ce dont on rêvait est un sacré bouquin qui atteste, s’il en était besoin, du talent de son auteur. C’est en quelque sorte la suite du Bonheur national brut qui nous relatait la vie de quatre copains de l’élection de François Mitterrand à celle de François Hollande. Le nouveau roman démarre quand le précédent finit, avec d’autres personnages. Avec plus de dépit également car Justine, Alex et Nicolas, qui nous sont brièvement présentés quand ils avaient vingt-cinq ans, approchent de la cinquantaine dans le reste du livre. Ils n’ont plus tout l’avenir devant eux et leurs rapports se sont étiolés. Au départ Justine était amoureuse d’Alex. On la comprend. Alex est mâle magnifique, il enchaîne les conquêtes, et quand ils se retrouvent au lit dès le premier soir quel festival. Pas de chance pour Justine, Alex qui ne lui a rien promis, n’a aucune envie de prolonger l’aventure. Justine se rabat sur Nicolas, le frère aîné d’Alex. Fin de l’épisode un. On les retrouve mariés vingt ans plus tard avec deux enfants, Adèle qui commence sa vie de femme et Hector encore adolescent. Nicolas est aussi propre sur lui que son jeune frère était jouisseur. Il a une bonne situation comme gestionnaire d’un grand hôtel alors qu’Alex a abandonné ses études aux Beaux-Arts pour devenir gigolo. Nicolas est le régulateur de sa famille, celui qui rassure tout le monde. C’est d’ailleurs lui qui a tant insisté pour le deuxième enfant. Devenue psychologue, Justine est beaucoup plus fragile. Elle n’a jamais réglé ses différends avec son père qui lui a pourri la vie comme il l’a fait avec sa femme. On le comprend d’autant plus facilement que Joseph nous est décrit comme un connard de première. Ancien gauchiste reconverti en intello proche du Front national, prétentieux car il a passé son existence à tenter d’écrire son « grand roman » sans jamais y parvenir, et vivant aux crochets de son épouse. Ce qui ne serait rien s’il ne déversait sa bile sur tous ceux qui l’approchent. Justine est trop faible pour lui résister. Nicolas trop réservé pour ne pas fuir les conflits. Reste Adèle qui s’en charge avec brio car elle est en plus capable de résister idéologiquement à son grand-père. Rien que de très normal quand on lit Piketty et Bernard Maris. Survient alors le licenciement de Nicolas et le fragile équilibre familial s’écroule. Alors lisez ce livre pour savoir s’ils s’en sortent. Éventuellement après Le bonheur national brut. De notre côté nous pourrions bien nous attaquer au premier roman de Roux, un polar. Il n’y a pas de mal à se faire du bien. C’est tout ce dont on rêve.

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