En théorie tout va bien. Enaid la trentaine passée est une belle femme qui réussit dans sa vie professionnelle. La preuve : elle arrive à Gdansk pour donner une conférence sur les femmes, leurs droits, leurs espérances. Mais elle apprend par téléphone dans un taxi qu’elle vient de se fait larguer. Déjà que Gdansk ce n’est pas folichon à moins d’aimer les chantiers navals ou la moustache de Lech Walesa. En vérité Enaid a eu une vie zarbi qu’elle va nous raconter dans le roman qui, soyez-en sûrs, tient beaucoup de l’histoire de Diane Ducret. Ça tombe bien, on apprécie cette écrivaine dont on vous a narré Les indésirables. Enaid n’a pas connu sa mère. Ou si peu. Elle se souvient juste d’une petite femme avec des cheveux blonds jusqu’aux reins qui est venue la chercher pour quelques heures quand elle était petite. Et voilà qu’elle se rappelle à elle après des années d’absence pour lui annoncer qu’elle se meurt d’un cancer. Même si elle a été une « mauvaise mère », cette femme n’a pas eu de chance. Elle a aussi été privée de la sienne enlevée par la Shoah. Enaid a grandi avec ses grands-parents paternels. Pas vraiment une poilade Yvette et André. Ils n’ont qu’une peur : qu’Enaid devienne une traînée comme sa mère. Le père Jean-Pierre y veille en s’attachant à en éloigner le malin. Pas étonnant que son éducation sexuelle se réduise au néant. Ce qui provoque une véritable panique quand les Anglais débarquent pour la première fois. L’apparition du premier nichon est assimilée à une tumeur et lui vaut un voyage express à l’hôpital. Et le second n’est pas loin d’être perçu comme une métastase. Enaid s’initie à l’équitation avec talent, brille dans quelques concours hippiques, tombe et se fracture la jambe. Impossible de la soigner. Elle grandit, migre de Paris à Biarritz, rencontre un jeune surfer à qui elle abandonne sa virginité. Et comme elle est une éternelle gagnante, elle se retrouve enceinte. Avortement. Le malin a encore frappé. Elle s’initie aux teufs de l’autre côté de la frontière, use et abuse de produits pas vraiment labellisés AB, avant de retourner à Paris pour entamer ses études supérieures. Elle tombe amoureuse d’un professeur italien. Excellent choix, le Macaroni l’emmène à Rome pour mieux la séquestrer et la fracasser. Elle finit par s’en sortir. Comme les flamants roses qui se contentent d’une patte pour se mouvoir.