Surbooké

Le blog de Laurent Bisault

Les huit montagnes, Paolo Cognetti, Éditions Stock

Fév 3, 2018 #Stock

Quatre ans plus tard, Paolo Cognetti remet ça. Mais dans une forme plus élaborée, un roman et non plus des carnets de montagne. Un roman qui vient d’obtenir le prix Médicis étranger. Un roman magnifique qui nous raconte l’amitié de Pietro et de Bruno, les rapports entre un fils et son père. Et qui nous offre le portrait d’une mère comme on vous en souhaite tous. Les deux enfants se rencontrent dans le petit village de Grana dans le Val d’Aoste. Pietro vient de Milan et arrive avec ses parents pour profiter de la montagne l’été. Sa famille n’a d’autres attaches lombardes que celle du travail car ils viennent de Vénétie et se sont initiés à l’altitude dans les Dolomites. On découvrira en cours de lecture les raisons de leur départ. La mère de Pietro est assistante sociale. Son père chimiste étouffe dans son logement milanais au point de hurler l’été quand le bruit l’envahit. L’installation estivale à Grana permet au père de renouer avec sa passion : gravir le plus vite possible les sommets. Il n’a d’ailleurs de cesse de vouloir y emmener son fils. D’abord dans les alpages vers 2 000 mètres puis à 3 000 et même 4 000 mètres d’altitude. Pas forcément une bonne idée car Pietro est pris de nausée quand il suit son père dans ses courses. La montagne qu’apprécie Pietro, c’est celle que lui fait découvrir Bruno. Dans le village d’abord mais aussi au bord de la rivière et dans la forêt. Le petit berger a toute latitude pour initier son ami car sa mère qui ne parle quasiment pas ne s’occupe pas de lui. Et son père, maçon, ne vit pas sur place. Son destin est déjà tracé : il sera éleveur comme son oncle qui l’élève en l’absence de son père ou alors maçon. Il a d’ailleurs arrêté l’école à onze ans. Il la reprend pourtant sous l’influence de la mère de Pietro qui le prend sous sa coupe. Bruno obtient ainsi le brevet. Quand il est question de l’emmener à Milan pour qu’il étudie dans un lycée professionnel, les choses se gâtent. L’oncle n’y voit aucun inconvénient puisque les parents de Pietro s’engagent à tout payer. Mais le père de Bruno refait son apparition et affirme son refus à coups de poing. Fin du premier épisode. On retrouve Pietro désormais âgé de trente et un ans. Son père vient de mourir d’une crise cardiaque pour avoir vécu trop rapidement dans sa vie professionnelle comme il le faisait en montagne. Pietro revient à Grana pour prendre possession de la bâtisse que lui a légué son père. Il y retrouve Bruno. La nouvelle maison de Pietro n’est qu’une ruine dans les alpages, parfaitement inhabitable. Mais elle est le lien qui le relie à son père. Bruno propose de la restaurer pendant l’été. Quasi gratuitement car Pietro n’a pas de revenus réguliers. Il vivote de ses voyages comme cinéaste dans l’Himalaya. Le chantier consolide l’amitié des deux hommes. Bruno dort sur place et Pietro assure le transport des matériaux depuis Grana à l’aide d’une mule. La réussite de l’opération convainc Bruno de sa capacité à construire son exploitation non loin de la maison de Pietro. Il s’y installe avec son cheptel de vaches au prix d’un gros emprunt. Le pari est audacieux, mais c’est là et ainsi qu’il souhaite vivre. La mère de Pietro n’a pas quitté la région après la mort de son mari. Elle constitue le pôle de stabilité entre tous les personnages qui en ont bien besoin. Pour son fils, pour Bruno et sa compagne. Elle se mue aussi en adorable-grand-mère capable de monter à l’alpage pour s’occuper de la fille de Bruno. On ne saurait trop vous conseiller de la découvrir par vous-même. Vous ne serez pas déçus.

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