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Le blog de Laurent Bisault

La bâtarde d’Istanbul, Elif Shafak, Éditions Phébus

Juil 5, 2019 #Phébus

Il y a plein de bonnes raisons de lire La bâtarde d’Istanbul. Parce ce que ce roman est écrit par une icône de la littérature féministe, et qu’en ces temps où le pouvoir des femmes ne cesse de progresser ce n’est pas le moment de se mettre mal avec elles. Parce que vous avez de façon impromptue aperçu une photo d’Elif Shafak, et que devant ses yeux et ses fossettes vous avez été instantanément électrisé. On s’interdit d’en dire plus sur son physique. Surtout sur ses roploplos qui sont pourtant assurément importants pour elle, car elle en a doté Zeliha et Asya, deux des principales protagonistes du livre. Parce qu’Elif Shafak est une femme courageuse, qui a osé parler dans ce bouquin du génocide arménien, ce qui lui a valu d’être traînée en justice où elle fut heureusement relaxée. Parce que certains personnages de ce roman ne cessent d’écouter Johnny Cash, ce qui est une preuve de bon goût. Parce que vous êtes curieux de la gastronomie turque et que dans ce cas vous en aurez pour votre argent. Vous allez vous gaver au fil des pages d’aubergines farcies à l’agneau, de boulettes panées, de feuilles de vigne ou de purée de sésame. Avant de vous achever si besoin de desserts légers comme l’aşure élaboré avec des pois chiches, du blé concassé, du riz, du sucre, des noisettes, des pistaches, des pignons, des figues, abricots et raisins secs. Sans oublier l’eau de rose. Et peut-être plus simplement parce que vous découvrirez avec plaisir cette présentation d’une Turquie infiniment complexe à travers la rencontre de deux jeunes filles. Asya qui vit à Istanbul dans une famille constituée de quatre générations de femmes, sans aucun homme car tous ceux de cette lignée sont morts avant leur quarante et unième année. L’autre s’appelle Armanoush. Elle est Américaine mais présente la particularité d’avoir des origines communes avec Asya, et d’avoir grandi au milieu d’Arméniens puis de Turcs. Le plus gros de l’histoire se déroule dans la famille Kazanci. Asya y est née bâtarde car sa mère Zeliha n’a jamais voulu révéler le nom de son père. Y vivent aussi les trois tantes d’Asya, grand-mère Gülsüm et l’arrière-grand-mère Petite-Ma. Elles se passent sans difficulté de toute présence masculine, certaines en ayant perdu le goût, les autres assumant pleinement leur vie de femme mais en dehors de la maison. D’ailleurs Zeliha ne manque pas de mettre en valeur son physique avantageux en portant minijupe et hauts talons tout en emmerdant ceux qui y trouveraient à redire. Elles forment ainsi un vrai résumé de cette mystérieuse Turquie, où des femmes avortent sans difficulté dès 19 ans alors que d’autres pratiquent la divination. Pour notre plus grand plaisir.

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