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Le blog de Laurent Bisault

Comme l’oranger amer, Milena Palminteri, Éditions Harper Collins

Déc 4, 2025 #Harper Collins

Sarraca petit village sicilien qui regarde du côté de l’Afrique,1960. L’avocat Pippino Calascibetta attend sa nièce Carlotta, qui travaille à Agrigente le chef-lieu de la province où elle est directrice des archives notariales. Jeune elle voulait devenir avocate, mais « Pippino » le lui avait déconseillé avec regret et détermination. Parce qu’en 1947 nombre de ses confrères s’appuyaient encore sur une sentence rendue au XIXe siècle par la cour d’appel de Turin, selon laquelle la fonction était réservée aux hommes. Carlotta, dont le père était mort le jour de sa naissance, a toujours su que son état de femme la condamnait à un statut inférieur, dans sa famille comme dans sa carrière professionnelle. En ouvrant un acte des archives notariales, elle découvre que sa mère et sa grand-mère maternelle avaient ourdi une machination contre son père pour lui faire croire qu’elle était sa fille. Et qu’une plainte avait été en retour déposée par Rosetta sa grand-mère paternelle. Le début de cette histoire remonte à 1924, quand les fascistes venaient de remporter les élections italiennes. Ça avait développé en Sicile des envies de ralliement au parti vainqueur, bien que l’île n’ait jamais rien gagné de ses précédents « maîtres », les Bourbons, les Espagnols, les Aragonais et les Français. Au début du XXe, la Sicile était encore aux mains de nobles qui vivaient de leurs terres confiées aux métayers, la bourgeoisie industrieuse émergeait, les premiers mafieux étaient déjà à l’œuvre. Le baron Rosario et sa sœur Rosetta possédaient des propriétés dont l’une était exploitée par Bartoli Messina. Ce paysan vivait avec sa fille Sabedda qu’il cherchait désespérément à marier, car après la mort de son épouse puis de sa belle-mère, il l’avait récupérée contre son gré. Dans cette société féodale où plus qu’ailleurs les hommes avaient tous les droits, Stefano le fils du baron viola Sabedda et lui fit un enfant. Rosario ne valait pas beaucoup mieux en tant que noble dispendieux qui ne lésinait sur aucune dépense, pas plus pour les fêtes, que pour les chevaux ou les femmes. Sans même avoir conscience qu’il était quasi ruiné.

« Qui travaille boit de l’eau, qui exploite boit du vin »

Très gros succès en Italie pour Comme l’oranger amer qui a été couronné du prix Bancarella 2025. Une récompense attribuée en 2022 à Stefania Auci pour Les lions en hiver. Plus que leur succès de librairie, les deux romans ont d’abord en commun un récit de la Sicile au début du XXe siècle. Même si ma préférence va à la trilogie d’Auci, l’histoire de cette filiation cachée est agréable à lire. L’orange amère est un fruit réputé immangeable dont l’arbre est utilisé en porte-greffe pour produire des merveilles. C’est un peu ce qu’est Carlotta dont on comprend rapidement qu’elle est née du ventre d’une pauvresse avant de se muter en fille d’une baronne. L’intérêt de la lecture n’est donc pas de découvrir l’origine de Carlotta, mais de savoir comment a été organisé le subterfuge. Cela nous emmène au cœur d’une Sicile confrontée au fascisme triomphant de l’autre côté du détroit de Messine. Il amènera au moins dans l’île un début de lutte contre la mafia. Rien de nouveau par contre pour les pauvres car ici « Qui travaille boit de l’eau, qui exploite boit du vin. ». Rien de nouveau non plus pour les femmes. Ainsi Nardina devenue baronne par son mariage, peine à s’affirmer. Mais comment aurait-il pu en être puisqu’elle n’était pas attirée par la maternité et qu’elle souhaitait poursuivre ses études ?. Au-delà de ces combats dont on connaît les issues, Comme l’oranger amer nous invite au voyage dans une Sicile dont les paysages et la gastronomie font rêver. Rien que pour les pâtes à l’ail, à l’huile et à la mie de pain émiettée et frite, les granités au citron, les anchois salés à l’huile, les pots de confiture d’orange, les pignons de pins, les amandes et les raisins secs, on s’y précipiterait.

Qu’en dit Bibliosurf ?
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