L’enclave c’est le troisième roman de Benoît Vitkine après les très réussis Donbass et Les Loups tous deux consacrés à l’Ukraine. Le correspondant du Monde revient cette fois en Russie au moment où l’Union soviétique a implosé. Quand le pays a eu la possibilité de se réinventer. Ce choix est porté par un jeune homme qui sortant de prison apprend que plus rien n’est comme avant. Que de l’Asie centrale au Caucase et à l’Ukraine les peuples réclament leur liberté. Et les Russes quel sera leur choix ? Repartir avec les mêmes aux commandes ou s’inspirer de leurs voisins occidentaux ? Certes l’avenir ne devrait pas appartenir aux communistes, mais comme l’explique un directeur de kolkhoze, ce sont eux qui ont les réseaux, les connexions. Eux qui tiennent les juges, qui sont responsables des achats des municipalités.
Il va pour cela traverser l’oblast de Kaliningrad, l’ancienne Königsberg prussienne
Le jeune homme s’appelle Le Gris et en cet été 1991 il sort de prison où il a su respecter les usages pour survivre. Il avait vite compris comment fonctionnait la société carcérale et le respect qu’il devait dans sa cellule au Vieux. C’est avec lui qu’il a découvert Dumas, Dostoïevski, Gorki, Steinbeck. Avant de retrouver la liberté un gardien lui apprend qu’après le Mur de Berlin c’est l’Union soviétique qui s’écroule. Même les Ukrainiens veulent se barrer, les activités du Parti communiste ont été déclarées illégales, et à Moscou Boris Eltsine s’est opposé à un putsch en grimpant sur un char. Après six mois d’incarcération le jeune homme rentre chez lui dans la ville de Sovietsk. Il va pour cela traverser l’oblast de Kaliningrad, l’ancienne Königsberg prussienne, un territoire coincé entre la Pologne et la Lituanie, cédé à l’Union soviétique après la seconde guerre mondiale. Au début il redécouvre les plaisirs anodins comme celui de faire la queue devant une crèmerie. Devant un ancien blockhaus allemand au bord de l’eau il rencontre des jeunes ravis de la nouvelle ère. Ils écoutent du rock américain sur une radio polonaise, ils ne seront plus obligés de travailler pour l’État, d’obéir aux bureaucrates, ils ne risqueront plus l’hôpital psychiatrique.
Pourtant des habitants de ce qui est en train de devenir « L’enclave » se montrent généreux
Pour Le Gris ils ne sont que « des pédés de démocrates aux gueules de hippies ». En suivant le jeune homme Benoît Vitkine dresse un douloureux portrait de l’Union soviétique soixante-dix ans après sa création. La violence semble régenter le pays, des malfrats aux policiers corrompus. On vend aussi bien de l’alcool frelaté que des femmes. Pourtant des habitants se montrent généreux en accueillant le jeune homme et en le nourrissant. Alors Le Gris demeurera-t-il la petite frappe qu’il a toujours été ? Lui qui a été renvoyé à dix ans des pionniers pour avoir piqué le couteau d’un chef. Ou saura-t-il tourner la page comme il le fait dans un village en protégeant un gamin ? Pour ce qui est de la Russie on connaît la réponse.
Qu’en dit Bibliosurf ?
https://www.bibliosurf.com/L-Enclave-109267.html
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