Léna Kotev a la quarantaine et vit à Paris. Elle est l’héritière d’une longue dynastie de médecins juifs qui remonte loin dans le passé. Pas nécessairement aux Thérapeutes, cette tribu juive qui vécut au premier siècle après J.-C. près d’Alexandrie. Mais au moins au début du vingtième siècle puisque le roman débute avec l’histoire de Pavel Alexandrovitch, son grand-père médecin et fils de médecin. Pavel était assigné à résidence quelque part au sud de l’Ukraine vers la Bessarabie que nous appelons aujourd’hui la Moldavie. Pavel habitait Ludichev et chevauchait à travers la forêt pour soigner ses patients. Dans cette Russie tsariste qui massacrait autant que faire se peut les Juifs, Pavel et Rivka sa femme envoient Mendel leur fils aîné étudier en Allemagne pour qu’il devienne professeur de médecine. Un magnifique espoir mais une grosse dépense pour cette famille qui mange à peine à sa faim. En Allemagne, qui n’a plus connu de pogrom depuis un siècle, tout sera différent. Mendel ne reverra jamais ses parents assassinés en 1905. Pavel ayant le privilège de ne pas voir le viol et le massacre de Rivka parce que tué en premier. Son diplôme obtenu, Mendel se marie. Il a un fils, Tobias, qui lui aussi veut devenir médecin et même chirurgien. Mais en 1933, Mendel se réfugie à Nice pour échapper aux Nazis. Au passage, Tobias perd une phalange amputée par un SA, un jour d’autodafé. Tobias ne sera jamais médecin. Le choix de Nice est plutôt avisé, les Juifs étant protégés par les Italiens qui envahissent la ville en novembre 1942. Mais en septembre 1943, les Allemands débarquent suite à la capitulation transalpine. Alois Brunner s’occupe personnellement des déportations. Ce roman pourrait être insoutenable, terrifiant. Il est plein d’humanité, de personnages optimistes. Léna est magnifique en cancérologue dévorée par ses angoisses mais toujours prête à aider ses patients. Une vraie réussite de ce médecin-écrivain qui nous avait déjà donné Le cas Eduard Einstein.