Surbooké

Le blog de Laurent Bisault

Les lois de l’apogée, Jean Le Gall, Éditions Robert Laffont

Jan 1, 2017 #Robert Laffont

Ce serait dommage de rater ce livre qui vous présente les élites françaises, littéraires, politiques et économiques, sur les trente dernières années. Avec un art du portrait qui fait penser à Bernard Maris. Le Gall traque la prétention avec un humour féroce dans une histoire tissée autour de trois personnages qui évoluent au milieu de célébrités réelles. Le premier personnage est Jérôme Vatrigan qui décroche en 1988 le Goncourt à vingt-trois ans pour son premier roman. Il ne s’en remet pas arrêtant sa carrière d’écrivain. Mais plutôt que de se lamenter, Jérôme change de voie et crée sa maison d’édition avec un total insuccès. Le vent tournera avec l’exhumation d’un inédit de Marcel Proust qui sauvera l’entreprise et plus encore son créateur. Jérôme est accompagné d’Antoine son frère. Très différent d’Antoine parce que selon leur père « Deux frères issus des mêmes couilles forment rarement une paire ». Si vous ne reconnaissiez pas Jérôme Cahuzac dans le personnage d’Antoine, c’est que vous revenez de Mars. Médecin, il relaie les thèses des laboratoires pharmaceutiques auprès d’un organisme officiel avant de se lancer dans la chirurgie esthétique histoire de gonfler son pécule. Installé à New York, il lifte, botoxe, galbe les mollets, reconditionne les nichons, sculpte les culs, allant jusqu’à pratiquer si nécessaire le blanchiment anal. Et quoi de plus logique pour ce sosie de Cahuzac que de s’occuper de blanchiment d’agents sales ? Cela ne l’empêche pas de se faire élire député PS en Lot-et-Garonne et de devenir ministre du Budget. Malgré ses déboires fiscaux, Antoine nous demeure sympathique. Greta Violante est le troisième personnage du roman. Cette Sicilienne qui épouse Antoine se révèle aussi glaçante au lit qu’énergique en affaires. Côté plumard elle n’a rien de volcanique ne tenant ni de l’Etna ni du Stromboli. Au point qu’interrogé sur une cicatrice sur le ventre de Greta, Antoine doit admettre ne pas l’avoir vue à poil. Les époux font d’ailleurs rapidement chambre à part. Mais dans sa vie professionnelle, Greta dépote emportant tout sur son passage pour devenir rapidement la seconde du groupe d’Arnaud Panaud. Un financier qui fait furieusement penser à Bernard Arnaud. On vous laisse découvrir comment elle roule son patron qui voulait la licencier. Devenue riche, Greta s’installe avec son mari dans un hôtel particulier où elle engage un majordome haïtien aussitôt surnommé Blanchet. Greta organise les dîners qui comptent dans Paris. La voilà membre de la Commission Attali qui explique en 2008 que « l’Italie, le Portugal et la Grèce ont mené des réformes courageuses pour contrôler leurs dépenses publiques ». Et que « l’Espagne a œuvré pour l’accès de tous à la propriété du logement, dans une économie en quasi plein-emploi ». On l’excuse car un agent de l’Insee y participait. L’essentiel étant quand même de figurer auprès de ceux qui comptent. Seul un détective privé allemand semble pouvoir nuire à Greta en fouillant son passé. Mais les crapules ont la peau épaisse. Surtout quand elle est passée entre les mains expertes d’Antoine Vatrigan.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *