Si l’on ne devait retenir qu’un seul argument pour inciter à lire ce roman ce serait le lieu où se déroule l’action. Meursault, Côte-d’Or. Petit bourg en lisière de Beaune, dont la seule évocation est susceptible de vous faire humer les meilleures effluves du chardonnay, le cépage qui assure depuis tant d’années la célébrité de ses crus. Ça a quand même plus de gueule que La Villageoise-sur-Mer ou Gévéor-les-Montagnes. Mais on peut trouver bien d’autres intérêts à ce roman. La découverte du petit monde du vin bourguignon dont les secrets n’ont rien à envier à ceux de la bourgeoisie bordelaise. Ou encore une action sur deux époques, la nôtre et celle de l’Occupation, le tout donnant une histoire haletante qui vous emmène vers la fin du livre. Côté contemporain, on découvre Kate jeune femme franco-américaine qui vit à San Francisco et prépare le diplôme le plus renommé du monde du vin, le Master of wine. Un examen de fou où il convient de reconnaître le cru, l’année et tout un tas d’autres éléments des verres de vin posés devant vous. Pour Kate, ce diplôme constitue le passeport indispensable pour une embauche chez Sotheby’s à Londres, la maison de vente aux enchères qui souhaite se lancer dans le commerce des plus précieux nectars. Kate retourne donc à Meursault, au domaine Charpin où elle est née afin de peaufiner ses connaissances. Elle y retrouve sa drôle de famille tout en non-dits, dirigée par le patriarche Philippe. La mère de Kate s’en est échappée il y a longtemps pour vivre sa vie de banquière d’affaires à Singapour, trop heureuse de s’extirper des pesanteurs familiales. Kate est ravie de revoir son cousin Nico, sa femme Heather ainsi que leurs deux enfants. Elle reprend également contact avec son ex Jean-Luc avec qui la rupture avait été douloureuse. Cela nous vaut une description de la vie des domaines bourguignons, avec notamment la paulée, cette fête traditionnelle qui fait suite à la dernière pelletée de raisin versée dans la cuve. Avant d’y participer pensez à vous mettre préalablement à la diète.
L’intérêt du roman tient d’abord de la passionnante description de la vie des Français sous le joug allemand
Côté Occupation, le personnage principal est Hélène. Une jeune fille que l’on découvre via son journal intime dont notre lecture commence au début de la seconde guerre mondiale. Hélène que Kate n’a jamais connue, était la sœur de son grand-père paternel. La face cachée de la dynastie, car on apprend assez vite qu’elle est morte peu après la Libération, une chouette période qui lui valut d’être tondue. Un divertissement en vogue à l’époque, qui fut infligé aux femmes pour de multiples et bonnes raisons dont la plus fréquente était la collaboration horizontale. L’intérêt du second volet du roman tient d’abord de la passionnante description de ce que fut la vie des Français sous le joug allemand. La faim qui les torturait, même à la campagne. La peur des résistants. Les diverses lâchetés qui permettaient de survivre. Le lien entre les deux périodes se fait par la découverte par Kate d’un passage secret au fond de la cave familiale. Un passage qui donne accès dans un premier temps aux plus belles bouteilles du XXe siècle comme paraît-il le millésime 1929. Une année qui ne fut donc pas uniquement celle du désastre économique. De la suite on ne vous en dira pas plus. À vous de la découvrir, sans aucune modération, cela va sans dire.
Cela donne envie d’ouvrir un blanc de la côte de Beaune et de lire “Le vin et la guerre, comment les nazis ont fait main basse sur le vignoble français” de Christophe Lucand
Santé !
Bon, moi le vin ce n’est pas mon truc, même si je suis passée au BSA du ministère 😉 mais l’histoire a l’air passionnante quand même !!