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Le blog de Laurent Bisault

Délation sur ordonnance, Bernard Prou, Éditions Anne Carrière

Juil 7, 2019 #Anne Carrière

Drôle de zozo que ce Bernard Prou. Ancien prof de maths il écrit un premier roman en autoédition. Il réussit à le faire lire au médiatique Gérard Collard qui tombe sous le charme. Boosté par le libraire, Alexis Vassilkov ou la vie tumultueuse du fils de Maupassant devient un succès au point d’être réédité en poche. Prou récidive, cette fois chez Anne Carrière, avec Délation sur ordonnance et c’est toujours aussi bien. Le titre du livre vient de ce qu’un ophtalmologiste utilisa en 1942 une de ses ordonnances pour dénoncer quatre personnes qu’il détestait. Le docteur Grégoire-Saint-Marly était, il est vrai, un sacré salopard. En témoigne l’affection qu’il avait pour un autre médecin avec qui il avait fait ses études, le docteur Destouches plus connu sous le nom de Céline. Donc comme Céline qui se plaignait « des apatrides prépucés, des métèques et des franc-maques » Grégoire-Saint-Marly n’aimait ni les Juifs, ni les étrangers, ni les Francs-maçons et se décida de le faire savoir en écrivant au préfet de sa bonne ville de Pau. Et pour faire dans le concret, il n’en resta pas aux généralités préférant donner les noms de quatre mauvais Français. Or s’il est une qualité que l’on ne saurait dénier aux fonctionnaires, c’est qu’ils font plutôt bien leur travail, surtout quand ils œuvrent dans la police. L’information fut donc transmise aux services pour qu’ils fassent le nécessaire. Cela permet à Prou de nous dresser un portrait très réaliste de l’époque où ses personnages se mêlent à des hommes et des femmes entrés dans l’histoire. On voit ainsi le sinistre Lafont de la rue Lauriston s’enrichir tout en torturant pour le compte de la Gestapo. Des miliciens tous plus pervers les uns que les autres. Mais interviennent aussi des résistants qui surent freiner ou même annihiler certaines actions de l’occupant. Vous découvrirez aussi les derniers locuteurs d’une langue béarnaise sifflée. Tellement compliquée à comprendre qu’elle est quasi inaccessible pour les Allemands. N’allez donc pas croire que le roman ne serait qu’une suite de scènes toutes plus terrifiantes. Il est au contraire souvent jubilatoire. On rit, on s’aime, on s’enfile parfois dans tous les sens. En vantant les qualités d’Alexis Vassilkov Gérard Collard avait comparé le physique de Bernard Prou à celui d’un nain de jardin. Mais ce n’est ni celui de Grincheux, pas davantage celui de Simplet, pas même celui de Prof, voyez plutôt du côté de Joyeux.

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