Deux années de documentation et à la sortie un premier roman d’aventures, un roman historique typé Dumas, une très belle réussite. Yan Lespoux n’est pas pour autant un néophyte puisqu’il a déjà publié Presqu’îles un recueil de nouvelles et un précis de littérature américaine. Mais ce prof d’Occitan est surtout connu pour son blog Encore du noir qui fait référence dans la littérature policière. Et dont le bon goût est attesté par les récentes présentations de bouquins comme La Ligne de Jean-Christophe Tixier, Shit ! de Jacky Schwartzmann ou encore Les gens des collines de Chris Offutt que l’on retrouve aussi sur Surbooké. Pour mourir, le monde c’est l’histoire d’un naufrage qui se déroule au XVIIe siècle au large du Médoc. Un naufrage où viennent converger les trois principaux personnages du roman. Fernando Teixeira un jeune Portugais contraint de s’embarquer sur un navire de son pays qui était alors une des premières puissances mondiales. Marie une très jeune femme issue d’une communauté de miséreux du Médoc. Et Diogo Silva tout aussi jeune que Fernando mais qui résidait à Salvador de Bahia. Nous les suivons d’abord dans leurs pérégrinations. Entre Lisbonne et Goa pour Fernando, au service d’un empire colonial dont la flotte parcourait le monde pour enrichir ses souverains et combattre l’hérétique. D’Inde on ramenait des épices, poivre et cannelle, tout en traquant les Protestants sur les mers et les Mahométans à terre. Au Brésil où habitait Diogo Silva il fallait se montrer plus fort que les navires anglais et hollandais, sans oublier d’amener les Sauvages dans la Sainte Église. Les rois portugais étaient alors alliés à ceux d’Espagne et des vents favorables soufflaient dans leurs voiles. Les pauvres sur lesquels ils s’appuyaient pour leurs conquêtes s’en sortaient moins bien. Il leur fallait survivre aux tigres de l’Inde, et échapper aux indiens brésiliens qui ne comprenaient pas qu’on ne coupât pas la tête et les mains de ses ennemis. Ils devaient braver la syphilis dans des comptoirs transformés en lupanar. Ensuite les attendait un ultime défi : affronter les habitants du Médoc qui vivaient certes de la résine des pins et du vol des animaux de leurs voisins. Mais surtout du pillage des embarcations qui s’échouaient sur leurs rives.
Les deux jeunes soldats ont pour l’instant survécu
Côte du Médoc, janvier 1627. Il s’est jeté à l’eau du navire échoué et s’accroche à un ballot de coton. Il devrait se noyer mais une vague plus forte que les autres le propulse sur le sable. Ils étaient cinq cents sur le bateau et il n’en aperçoit qu’un seul sur la plage. C’est un esclave indien vite assassiné par des pilleurs d’épaves qui se sont précipités pour récupérer ce que la mer avait dégueulé. Fernando Teixeira soldat de l’Inde est finalement sauvé par une jeune femme qui lui fait signe de la rejoindre avant de lui tendre un manteau de laine. Canal du Mozambique, août 1616. Le São Julião avance à allure nonchalante emmenant Jésuites, Dominicains, paysans enrôlés de force, criminels exemptés des geôles portugaises et soldats. Fernando Teixeira regarde son ami Simão perdre aux dés une poule grise dans la chaleur fétide de l’entrepont. Les deux jeunes soldats ont pour l’instant survécu au scorbut, aux poux, aux rats, et aux autres passagers, quand subitement une frégate anglaise s’approche. Le combat entre le lourd navire marchand portugais et la flottille anglaise se déroule sur plusieurs jours. Le São Julião est coulé, les survivants utilisent un radeau et débarquent sur une île. Moins de la moitié de ceux qui avaient embarqué à Lisbonne repartent sur une autre embarcation vers Goa en Inde. Fernando et Simão en sont.
On s’était convaincu que l’armada ne viendrait pas
Médoc, mars 1623. Marie quinze ans quitte sa famille pour aller à Bordeaux. C’est le prix à payer pour survivre, pour échapper à la misère des gemmeurs, c’est du moins ce qu’elle espère. Marie trouve du travail dans une taverne où l’essentiel de son labeur consiste à descendre à la cave pour remplir les pichets de vin et à refuser les propositions malhonnêtes des clients. Marie finit par s’enfuir après avoir assommé un homme qui voulait la forcer, elle revient dans le Médoc, et rejoint son oncle et parrain Louis qui tient lui aussi une taverne. Sâo Salvador de Bahia, mai 1624. Diogo Silva marche au milieu des plantations de canne à sucre tout en entendant au loin les déflagrations du canon. Quand apparaissent soudain vingt-six navires hollandais dans la baie, la foule est saisie. Trois mois plus tôt informé par Madrid, le gouverneur-général avait mobilisé hommes et indiens pour se protéger des soldats et plus encore des mercenaires engagés par la Compagnie néerlandaise des Indes. Le temps s’était écoulé, on s’était convaincu que l’armada ne viendrait pas. Mais aujourd’hui avec les bombardements la foule fuit. Carlos Silva le père de Diogo préfère rester. Il a déjà eu du mal à s’adapter au Brésil et à faire oublier sa judaïcité troquée contre un statut de nouveau chrétien. Il ne veut pas non plus abandonner son commerce. Cela lui vaut l’embrasement de sa maison touchée par le bombardement puis la mort avec son épouse. Seul Diogo survit.
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