R.J. Ellory est un immense écrivain et Au nord de la frontière son dernier bouquin une très grande réussite. J’ai eu l’occasion de le croiser à la dernière Foire du livre de Brive. Je n’avais pas prévu d’aller le voir, mais j’ai profité d’une accalmie peu après la pause déjeuner pour m’approcher de son stand . Il n’y avait personne en dehors de la petite équipe des éditions Sonatine. L’affluence dans ces salons littéraires est un très mauvais indicateur de la qualité des personnes que vous pouvez y croiser. Ainsi à Brive deux « écrivains » locaux, François Hollande et Patrick Sébastien, y font régulièrement un tabac. Sauf à aimer partager les recettes à base de flanby et de sardine cela reste un mystère pour moi. Je n’avais pas grand-chose à dire à celui dont j’ai lu tous les livres et dont j’ai déjà chroniqué neuf bouquins. Je n’avais rien à faire dédicacer car je lis en format numérique. Je ne suis pas davantage amateur de selfies, je me suis donc contenté de dire au natif de Birmingham et néanmoins merveilleux conteur de l’Amérique profonde, à celui qui m’apparaissait comme quelqu’un de très simple, que je l’admirais beaucoup. Ce n’est sûrement pas son dernier roman qui me fera changer d’avis.

La recherche du mal est une constante dans l’œuvre d’Ellory

Au nord de la frontière vous emmène tout doucement au cœur de son histoire quelque part au pied des Appalaches. Ici la pauvreté est de mise, ce qui semble avoir dessiné un terrain de choix pour les adeptes du roman noir. Chris Offutt dans Les gens des collines, David Joy dans Là où les lumières se perdent et Ce lien entre nous, et récemment S.A. Cosby dans Le Sang des innocents s’y sont essayés avec succès. R.J. Ellory fait au moins aussi bien en prenant son temps. Il n’est pas du genre à glisser un rebondissement à la fin de chaque chapitre. Il installe ses nombreux personnages dont aucun ne jouera le rôle du super-héros. Chacun fait selon ses moyens et quelques-uns incarnent le mal parce que nous sommes dans un roman noir et que ce thème est une constante dans l’œuvre d’Ellory. Mais quand l’action s’accélère, quand le puzzle de l’enquête a pris forme, accrochez-vous. Dans ces coins paumés de la Géorgie aux confins du Tennessee tout le monde s’affole après la découverte de deux puis trois jeunes filles assassinées. Or « les gosses c’est l’élément vital d’une communauté ». Dans leur malheur les enquêteurs ont quand même un avantage. Plus il y aura de mortes, plus ils auront d’opportunités de coincer le ou les coupables. S’ils y parviennent.

Victor Landis avait bien l’intention de ne pas s’en mêler

La nouvelle de la mort de son frère Frank arriva peu après le petit déjeuner. Il avait été écrasé par un véhicule avec un bon paquet d’allers-retours pour être plus sûr du résultat. Les deux frères Landis étaient tous les deux shérifs mais pas au même endroit. Ils ne se parlaient plus et ne s’étaient pas vus depuis longtemps. Victor se rendit pourtant à Trenton dans le comté de Dade en Géorgie, au pied des Appalaches, pour reconnaître le corps de Frank. Et quand en ce matin du 15 août 1992 Victor l’aperçut pour la dernière fois, ils n’avaient comme d’habitude rien à se dire. Victor n’avait aucunement l’intention de prolonger son séjour au-delà des obsèques, ni de fouiller dans la vie de son frère. Même Eleanor Boyd l’ex-femme de Frank qu’il découvrit à cette occasion en compagnie de sa fille Jennifer ne l’intéressait pas. L’enquêteur Mike Fredericksen avait débuté son travail et Victor Landis avait bien l’intention de ne pas s’en mêler. Pourtant quand Eleanor l’informa que la généreuse pension alimentaire que lui versait ponctuellement Frank depuis des années provenait d’un compte inconnu, et qu’elle continuait à la percevoir, Victor commença à poser des questions. Il fut aussi intrigué par les rumeurs qui circulaient sur son frère. Tout shérif qu’il était, Frank aurait trempé dans des affaires louches. Viktor revint donc à Trenton pour y voir plus clair.

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